Le Slow Movement appelé aussi Slow Attitude et en français » Mouvement doux » propose de ralentir notre rythme de vie, de prendre le temps d’apprécier les choses, d’adoucir les contraintes modernes. Il est en opposition directe avec la restauration rapide, le tourisme de masse, l’hyperconnection, la consommation sans limite. Au delà, il développe une démarche écologique dans le but de diminuer notre impact sur l’environnement. Enfin, il recherche la simplicité dans un monde de plus en plus complexe.
Au fil des ans, le mouvement est devenu une contre-culture dans divers domaines dont l’urbanisme et la mode. De nombreuses personnes dans le monde se mobilisent désormais pour la lenteur et créent différents mouvements grâce auxquels ralentir le rythme et apprécier la saveur des jours deviennent des actions concrètes. Et le slow s’applique à tous les domaines de notre vie. Il s’étend désormais au travail (slow business), à la famille (slow parenting), au milieu scolaire (slow school), au voyage (slow tourisme), aux villes (slow city), aux relations amoureuses (slow sexe). Mais aussi à l’art (slow art), à la beauté (slow cosmétique), à la science (slow science), à la lecture (slow book)… Chaque aspect de notre vie peut en fait être vécu sous l’angle slow.
Le Slow Food
Le Slow Food est une réaction contre la restauration rapide. Le début du mouvement dans ce secteur remonte à 1986 avec la protestation lancée par le journaliste, sociologue et critique gastronomique Carlo Petrini contre l’ouverture d’un McDonald’s à la Piazza Di Spagna à Rome. L’association compte aujourd’hui 100 000 membres dans 150 pays dont 2000 en France. Les membres sont répartis dans 1500 « conviviums », des structures locales qui organisent des ateliers du goût, des repas thématiques, des visites chez les producteurs… Soucieux de manger « bon, propre et juste ».
C’est aussi une autre façon de nouer une relation à l’alimentation en consommant des produits locaux et de saison, en prenant plaisir à cuisiner, à savourer les moments passés à table ou en cultivant un potager, à repenser la manière dont on se nourrit en choisissant ses aliments. En tant que consommateurs, nous avons le pouvoir de décider de ce que nous mettons dans notre assiette. Le réseau « La ruche qui dit oui » qui met en relation agriculteurs et consommateurs en fait partie.
Slow working
Si vous en avez assez de courir toute la journée, du lever au coucher, dans les transports en commun ou à votre travail, réfugiez-vous dans le Slow Working , ralentissez le rythme. Certains font le choix d’être moins payés, bannissant la formule chère à certains politiques « Travailler plus pour gagner plus », choisissant de » Travailler moins pour vivre mieux », de faire moins d’heures, de préférer le télétravail, pour gagner quelques heures de sommeil, pour profiter de leur famille et de la vie. Réorganisez votre emploi du temps, le travail s’il est important pour vous permettre de faire face aux besoins quotidiens n’est qu’un élément de votre vie qui doit reposer sur le trépieds Famille-Travail-Loisirs. Choisissez l’équilibre, évitez de continuer à jouer à l’équilibriste évoluant sur le fil invisible et mouvant qu’est devenu votre quotidien.
D’autres ont fait le choix de ne plus travailler, de vivre du RSA ou d’espérer obtenir un jour un salaire universel. Le Slow Working est une solution intermédiaire. C’est peut être l’occasion, en réorientant votre vie, en changeant d’activité de faire quelque chose que vous aimez.
Slow tourism
Le tourisme doux ou écotourisme vise à développer les voyages écologiques en phase avec le milieu culturel local.
Slow mobility
Les adeptes de la mobilité douce ou écomobilité préconisent l’usage du vélo ou les déplacements à pieds en remplacement de la voiture. Ce sont de farouches défenseur des théories du sociologue Ivan Illich qui dénonçait l’importance qu’avait pris l’automobile dans notre vie. Nombre d’entre eux sont membres du mouvement sans voiture Carfree.
Slow éducation
Dans son ouvrage » Manifeste pour une enfance heureuse », le journaliste canadien Carl Honoré, auteur en 2004, du best-seller « Éloge de la lenteur » conseille aux parents de laisser à leurs enfants… » le temps et l’espace pour explorer à leur rythme ». Lenore Skenazy auteure du blog » Free-range kids » dénonce la surprotection des enfants qui, selon elle, ne les autonomise pas. Elle estime que… » les parents doivent donner autant de liberté à leurs enfants qu’ils en avaient pendant leur enfance et admettre qu’il n’y a pas cinquante fois plus de prédateurs que dans leur propre jeunesse ». Les militants du « Slow Parenting » ont défini 15 principes dont l’allègement des programmes scolaires et l’instauration à l’école de moments sans activité. Ils approuvent également les écoles de type Freinet, Montessori ou Steiner qui utilisent des méthodes éducatives alternatives, bannissent la compétition entre les élèves et proscrivent la notation. Ils sont les partisans de Ivan Illich, homonyme d’un héros de Tolstoï, philosophe, universitaire et essayiste autrichien ,reconnu pour ses travaux sur l’éducation, prônant une société déscolarisée. Ivan Illich a été influencé par le sociologue des civilisations Arnold J. Toynbee, par Everett Reimer le théoricien de l’éducation sans école et par l’économiste Leopold Kohr, l’inventeur du concept de la décroissance et de la formule « Small is beautiful ».
En 1961, il fonde à Cuernavaca, au Mexique, une université libre et sans diplôme. On y recrute enseignants et étudiants par petites annonces dans la presse américaine ; vient qui est intéressé. Ivan Illich mettra un terme à l’expérience en 1976, jugeant que sa mission de popularisation culturelle avait atteint son but. En 1975 il publie « Energie et équité » dans lequel il remet en cause la toute puissance de l’automobile dans nos sociétés modernes.
Slow City
Orvieto en Italie abrite le siège du réseau CITTALOW qui regroupe plus de 150 villes dans le monde de moins de 50 000 habitants. Ce projet est né en 1999 à l’initiative de Pier Giorgio Oliveti. En France 8 villes adhéraient il y a quelques années au réseau dont Mirande dans le Gers. Elles ont signé un manifeste de 70 recommandations par lequel elles s’engagent à mettre en valeur le patrimoine de la ville, la propreté, la création d’espaces verts, le développement des commerces de proximité, la limitation de la voiture…Des inspecteurs du réseau CITTASLOW effectuent des contrôles tous les trois ans.
Les villes respectueuses du manifeste reçoivent un Label (non reconnu par l’État) dont le logo bien sûr est…. un escargot.
Slow parenting
Ce concept a été abordé par le journaliste Carl Honoré. Il consiste à moins organiser et à moins planifier afin de permettre aux enfants de profiter du temps libre et d’explorer le monde à leur propre rythme. Les jeux électroniques ne sont pas interdits ou bannis mais limités dans leur usage et on fait appel à des jouets traditionnels plus simples souvent réalisés localement en bois comme les jouets de jadis. Les enfants sont encouragés à développer leur créativité. On incite par ailleurs les enfants à définir et à développer leurs propres centre d’intérêts et à privilégier la sphère familiale, sans interdire les relations extérieures et la sociabilisation. Quant aux parents ils se veulent responsables et disponibles, veillant à éviter la surconsommation et en prônant une vie simple, proche et respectueuse de la nature.
Slow tv
Selon Rune Moeklebus, directeur des programmes chez NRK, la chaîne de télévision publique norvégienne… » C’est de la télé-réalité au sens littéral du terme, quelque chose d’authentique, que l’on montre en temps réel et sans condensé ». Ces programmes qui rencontrent un très grand succès d’audience, attirant en moyenne 3,2 millions de téléspectateurs, consistent en la diffusion en continu pendant plus de 100 heures d’un feu qui crépite dans une cheminée, la transhumance des rênes, le voyage d’un paquebot le long des fjords…La Norvège s’est faite la spécialité de cette nouvelle forme de télévision que l’on qualifie de « téléscargot ». Selon la sociologue Arve Hjelseth de l’Université de Trondheim… » c’est pour les gens l’occasion de se poser, de se détendre, de méditer ».
La chaîne indépendante internationale « Souvenirs from earth » diffusée en France dans un certain nombre de bouquets propose ce type de programme contemplatif. Parmi les programmes les plus populaires diffusés en direct ou en streaming par NRK, en 2009. Ce voyage en train d’Oslo à Bergen à l’occasion du centenaire de la ligne (durée 7 heures), une expédition au Pôle Nord d’une durée de 134 heures ou le processus détaillé du tricot. Le 31 Janvier 2020, la chaîne publique NRK annonçait la diffusion d’une émission, la plus lente jamais proposée jusque là…9 jours en Arctique autour du Spitzberg la plus grande île du Svalbard. Selon Thomas Hellum de NRK… » A travers 17 caméras, une abondance d’histoires et d’informations, toutes accompagnées de musique norvégienne et same, nous offrons aux téléspectateurs du monde entier le moyen le plus proche et le plus durable possible de vivre un voyage extraordinaire. Cette production est la plus lente et en même temps la plus étonnante jusqu’à présent « .
La Slow TV gagne peu à peu d’autres pays. Après Netflix qui a proposé son propre feu de cheminée sur plusieurs épisodes, plusieurs chaînes de télévision américaines travaillent sur des adaptations des programmes norvégiens. Pendant ce temps en Espagne, une chaîne a diffusé durant 3h45 un voyage en train de Saragosse à Confranc. Un message diffusé en début de reportage prévenait la téléspectateur…« Ici commence le voyage. Voici une occasion de modifier le temps, de te laisser porter. De te détendre et de commencer l’année de façon différente sans te dépêcher. Lentement, c’est une nouvelle expérience ». En Suède, une caméra a filmé durant 450 heures une rivière traversée par des élans.
Claude Marsal
Cet article a été publié dans notre revue JOHO dont vous pouvez découvrir içi une présentation en vidéo .